Sur notre terrain des ossements humain ont vu le jour, une tombe insoupçonnée a été découverte.
Un matin (pendant que nous étions à Tuléar) lundi 15 décembre après une grosse pluie les ouvriers du chantier ont découvert un affaissement suite au passage du camion qui venait livrer des matériaux. Cela fait 5 mois que les camions passent là pourtant. Dans ce trou, un crâne humain. Ici le respect des ancêtres, le culte des morts et les croyances qui y sont liées sont très importants. On peut craindre un malheur comme une bénédiction. Certains ouvriers ont été un peu perturbés au cours des jours qui ont suivi.
- Première démarche : prévenir le chef du quartier en son représentant : une présidente. Ce qui fût fait par l'entrepreneur en notre absence.
- Deuxième démarche organiser une réunion en présence des « sages » du quartier : présidents, vice-présidents des différentes associations, le responsable de l’entreprise et son chef de chantier, la communauté. cette rencontre a eu lieu à notre retour vendredi 19 décembre. Des discussions qui ont duré peut-être 1h sans qu’on n’y comprenne rien (en Malgache) nous fait déboucher sur plusieurs démarches à poursuivre : prévenir l’autorité ecclésiastique, le chef principal de Talatamaty (grande subdivision de la commune) puis à la mairie pour demander l’autorisation d’exhumer le squelette, et de nous donner un emplacement dans le cimetière communal. Jadis, les habitants du quartier se souviennent que des corps avaient été exhumés par leurs propriétaire et accompagnés du rite traditionnel (qui se fait toujours à chaque enterrement) le « FOMBA BETSILEO MALAGASY » qui consiste à bénir le corps avec de l’alcool, s’adresser au mort, tuer un zébus rite sacrificiel. Nous avons échappé au sacrifice du Zébus. Notre entrepreneur a fait valoir que cela avait déjà été fait aux exhumations précédentes. Sans doute que ce corps avait été oublié. Quand on sait les frais que cela peut coûter, on était un peu inquiétée de devoir le faire.
- Quatrième étape : Lundi 22 décembre une dizaine de jeunes hommes institués pour cela sont venus fouiller pour retrouver tous les ossements et vérifier s’il n’y aurait pas d’autres tombes, en présence de nombreux curieux. Ouf ! il semble qu’il n’y en a pas d’autres.Tout un rituel accompagne cette opération. D’abord la bénédiction chrétienne par le prêtre, puis le vice-président accompagné d’un « sage » du quartier commence par parler longuement au défunt en « s’excusant de le déranger, on va être obligé de l’exhumer parce que des sœurs habitent maintenant sur ce terrain et que c’est mieux qu’il rejoigne le cimetière communal... ». Il bénit d’abord avec de l’eau préalablement bénite par le prêtre, puis avec de l’alcool versé sur la tombe et sur les outils neufs qui serviront à creuser. A ce moment-là, les jeunes hommes commencent la fouille de la tombe après avoir bu un verre Toga Gasy, alcool pur. 5l d’alcool ont à peine suffit pour tout ce rituel Tous les os sont retirés un à un et le squelette est reconstitué sur un «lamba» (tissu blanc ou linceul) reposant sur une natte. Il y a eu encore une prière chrétienne et bénédiction par le prêtre. On procède au rite habituel comme pour un mort en portant le linceul sur les épaules des hommes en chantant. Mis dans un cercueil fait avec les planches du chantier on l’a transporté jusqu’au cimetière communal dans le 4x4 du vicaire général. Ce cimetière est situé à une quinzaine de km de notre lieu d’habitation. J’ai suivi le cortège mais la piste longue ne permettait pas que je puisse continuer avec une voiture ordinaire. Je n’ai donc pas suivi la suite de l’évènement puisqu’il fallait rester auprès de la voiture. Les mêmes jeunes hommes ont creusé un trou d’1,5 m de profondeur , le cercueil y a été déposé accompagné une dernière fois d’une prière profane avec encore de l’alcool versé sur le cercueil par signe de respect et une prière Chrétienne.
Ce qui nous a beaucoup touché dans cet évènement c'est la disponibilité du vicaire général qui a passé presque toute la journée, les responsables du quartier, le président local de la paroisse et l'aide précieuse de sa femme, l'entreprise qui a pris à sa charge l'achat de l'alcool, les outils neufs, le repas qu'il a fallu préparer pour nourrir ceux qui sont venus pour creuser ou constater (près de 20 personnes)
C'est une initiation pour moi. Les ouvriers sont maintenant rassurés, il peuvent travailler en toute tranquillité.
Juste en face de notre lieu d'habitation une personne âgée est décédée le samedi 21 décembre et durant 3 jours et 3 nuits la famille et les amis sont venu chanter autour de la défunte et ...boire de l'alcool évidemment. La défunte a été enterrée le lendemain de notre cérémonie par la même équipe. 2 zébus ont été sacrifiés, beaucoup d'alcool versé et de nombreux kilos de riz cuits pour nourrir tout ce monde. Les enterrements à Madagascar appauvrissent considérablement les familles qui sont par avance déjà très pauvres, ils y mettent toute leur richesse. C'est pourquoi il existe des cimentières communaux pour les indigents.
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